L'Homme De Neandertal (1953)

Le professeur Clifford Groves, un obscur scientifique américain mène des recherches sur les origines de l'Homme dans son laboratoire, afin de démontrer via l'étude de la morphologie crânienne, que l’homme de Neandertal était tout aussi intelligent – voire plus – que l'homo sapiens. Devant le rejet unanime de cette théorie fumeuse par la Société Naturaliste, Clifford Groves va mettre au point un sérum pour revenir à l'état préhistorique et se l'injecter lui-même…

Après avoir connu un très bon succès d'estime en Europe avec des films comme Moulin Rouge (1928) ou Piccadilly (1929), le réalisateur allemand Ewald André Dupont est parti tenter sa chance au début des années 30 à Hollywood, afin d'asseoir une réputation acquise à la force du poignet sur le vieux contient.
Or, malgré tout son talent, l'homme n'arrivera pas vraiment à s'imposer sur le territoire ricain et devra s'attacher la plupart du temps à signer bon nombre de scénarii pour la télévision (Big Town) ainsi que quelques documentaires comme Pictura en 1951.
Surfant sur la vague récente du succès de la SF outre-Atlantique, Ewald André Dupont va revenir à la réalisation en 1953 via un film d'épouvante, The Neanderthal Man (récemment sorti chez Bach Films sous le nom de L'Homme De Neanderthal… avec un H !).

En voici le pitch : depuis quelques temps, une petite ville tranquille des Etats-Unis est le théâtre d'apparitions d'un étrange félin qui correspondrait à un tigre à dents de sabre, une espèce disparue depuis 10000 ans avant notre ère ! Après être tombé nez à nez avec la bête, le garde forestier Georges Oakes fait appel au Dr Ross Harkness (Richard Crane) qui va mener son enquête sur ce mystère, qui semble de plus en plus tourner autour du laboratoire du Professeur Clifford Groves (Robert Shayne)…

Visiblement conscient de la difficulté de mettre sur pied The Neanderthal Man et de ne pas perdre l'attention du spectateur, Ewald André Dupont va opter pour une construction de son film en deux étapes. La première va tourner autour de la recherche du tigre à dents de sabre et de la mise en place de la personnalité sombre d'un Professeur Groves colérique et désabusé. Une manière habile de faire montrer la pression et de dévoiler les aspects des personnages principaux.
Dans un second temps, le réalisateur va rentrer dans le vif de son sujet avec (enfin) l'apparition de l'homme de Neandertal, fruit de la transformation du professeur en un être préhistorique incapable de résister à ses instincts meurtriers (comme dans Dr Jeckyll & Mr Hyde). C'est à partir de ce moment, que le film va véritablement se lancer grâce aux scènes de transformations de Groves assez bien réussies et ses attaques assassines…

Evidemment, on ne peut pas dire que The Neanderthal Man va nous éblouir par sa flamboyance scénaristique et une qualité technique infaillible. Non, loin de là même : les erreurs de montages sont légion, le masque de l'homme de Neandertal est assez basique (alors que la scène de transformation elle, est superbement travaillée), certains effets spéciaux sont ratés (le tigre à dent de sabre est une peluche…) et certains acteurs secondaires laissent parfois à désirer (dont Beverly Garland alors débutante).
Cependant, le film possède une bonne dynamique qui fait qu'on ne s'ennuie pas devant les tribulations du Dr Groves prêt à tout pour prouver sa théorie de l'évolution ou au fil de l'enquête de Ross Harkness qui cherche à percer le mystère du tigre à dents de sable puis celui de cet étrange "homme-singe" assassin…
De plus, même si on ne peut pas dire que l'originalité soit de mise au travers d'un scénario somme toute assez classique, le fait de mettre en avant un personnage principal tout bonnement détestable et antipathique comme celui du Dr Groves permet de donner au film un petit cachet assez plaisant.

En fin de compte, The Neanderthal Man s'avère être une bonne petite série B de SF bien sympathique qui se regarde avec un p'tit plaisir coupable. En effet, la pellicule n'a rien d'innovant, rien de bien spectaculaire, possède son lot d'images kitch et de maladresses… mais peut se vanter de posséder un beau brin de charme ! Un charme certes désuet, mais réellement indéniable.
De plus, la réalisation d'Ewald André Dupont est tellement sincère dans sa démarche (même si elle est techniquement pauvre), qu'il serait dommage de passer à côté de ce The Neanderthal Man.